L'idée d'animal dans le langage ?
A travers la plupart des langues notamment le grec, le latin, les
langues slaves ou le chinois, l'idée de l'animal découle de
plusieurs concepts : celui du mouvement (dongwu en
chinois), celui du souffle (anima en latin),
plus simplement celui de la vie (zoo en grec ou žival
en slovène). L'animal se définirait
donc comme une chose vivante au sens large mais se distinguerait du
végétal par sa capacité à se mouvoir. L'animal est un être
animé. Cette définition inclut l'homme largement. Dans la tradition
bouddhiste mais également dans certaines croyances pré-socratiques
(pythagorisme?) c'est le souffle, l'âme, qui se réincarne de corps
en corps et unit les êtres à travers le vivant tout entier.
Aujourd'hui la considération de mouvement est un critère qui
devrait trancher l'appartenance au règne animal. Le terme de
« fruits de mer » est en cela trompeur qu'il semble
désigner des espèces dépourvues de contrôle de leur mouvement
alors qu'il est clair que c'est faux. Mais il est clair que c'est la
conscience de la vie qui est sacrée et qui disparaît avec la
viande, cet objet inerte dépossédé de tout mouvement et d'âme.
Manger un animal vivant est une pratique courante dans certaines
cultures et considérée comme dégoûtante dans d'autres. Ingérer
de la matière organique vivante n'est pas évident car elle suppose
la mise à mort simultanément. Cette mise à mort, ce meurtre est
difficilement acceptable. Nous ne l'assumons pas et préférons nous
en détacher pour garder l'image de la viande comme simple objet de
consommation et non plus comme partie de cadavre d'animal.
L'animal
dieu ?
Comprendre
l'évolution de l'image de l'animal à travers l'histoire c'est
comprendre l'évolution de l'image de la nature et celle des dieux.
Il faut noter un renversement de la crainte à la recherche de
domination. L'animal peut être une proie mais il a été aussi un
prédateur. A l'image de la nature entière l'animal peut alors
représenter le danger, la menace. Si l'image du dieu monothéiste
est celle d'un homme et qui plus est, d'un père protecteur et
charitable, la palette de divinités des croyances plus anciennement
polythéistes offre davantage l'idée de dieux que l'on craint. Ils
représentent la nature, l'incertain, l'indéfini, l'inconnu. Lorsque
l'on voit des dieux animaux on ne voit pas des animaux au sens propre
mais plutôt des représentations mystiques de la force supérieure
de la nature. On ne peut considérer le rapport de l'homme à
l'animal sans l'inclure dans une dynamique qui tend à se rapprocher
ou s'éloigner du divin ou de la nature. De cette crainte et de
l'incapacité à connaître est née chez l'homme une forme de
respect et d'admiration. L'animal est un symbole et ce symbole se
mêle avec l'image du divin.
Le
serpent à plumes n'est pas un simple serpent autant que n'existe un
éléphant à plusieurs têtes. Le dieu animal ou l'animal
mythologique ou mythique est singulier mais n'est pas totalement un
monstre. Il est une chimère, l'invention née d'animaux existants.
Il est l'extrapolation de qualités admirées, et l'exemple le plus
frappant serait bien le dragon de la mythologie chinoise. En effet
celui-ci n'est pas le simple reptile ailé occidental, il est
l'union, la fusion de tout un panthéon d'animaux. Cet assemblage de
formes lui confère un mélange de qualités, de vertus. L'animal des
temps anciens figure la force de la nature et oblige la soumission de
l'homme à son égard. L'animal divin ou le dieu animal rejoignent la
conception d'une nature divine ou d'une divinité-nature. Dans cette
suprématie des forces du monde l'homme n'a que le pouvoir d'implorer
la pitié et le pardon des dieux.
Le
symbole animal est très fort quelque soit la société, la culture.
Très souvent ce sont des formes anthropomorphes qui mêlent l'allure
de l'homme avec le visage d'un animal. Le visage, la tête est pour
autant la partie pensante de l'homme celle qui lui permet de voir,
d'entendre, de goûter, de parler c'est donc le siège de la plupart
de ses qualités qui sont censées faire de lui un homme, différent
de l'animal et pourtant c'est cette partie qui est animale dans la
symbolique divine ou mythologique. Nous retrouvons de nombreuses
chimères, tels les centaures ou minotaures qui associent les
qualités de l'homme avec celles de l'animal, avec l'idée de la
réincarnation dans certaines croyances l'animal ne devient sacré
seulement parce qu'il renferme potentiellement l'âme d'un humain.
L'homme se transforme en dieu en fusionnant avec l'animal, en
s'émancipant, en prenant le pouvoir. Il croit s'élever au dessus de
la nature, maîtriser les éléments. Les premières civilisations
voient naître des semi-dieux, qui sont alors princes, empereurs,
rois, maîtres de populations. Ces figures asservissent l'humanité
et la nature entière dans l'idée d'omnipotence.
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