L'animal – Du mythe
à l'absurde
Nous
vivons dans l'ère de l'image. L'évolution de nos mentalités
s'inscrit chaque jour davantage dans un rapport à l'image. Avant
même l'échange d'idées, les individus confrontent leurs avatars,
leurs symboles, leurs signes, leurs marques. La connaissance du monde
sensible n'est qu'une accumulation d'images mentales d'une chose. Une
chose n'est qu'une accumulation d'images mentales, de conceptions
intelligibles d'une partie du monde sensible. Si nous ne pouvons
accéder à l'essence des choses, l'image reste la limite du rapport
à l'être. Toutes les conceptions mentales que nous pouvons nous
faire d'une chose ne sont que des images, des représentations.
Jamais ne ne pouvons atteindre l'essence des choses.
Intéressons-nous
à cette partie du monde que nous appelons « l'animal ».
La connaissance que nous en avons s'est construite autour des images.
Le rapport que l'homme entretient avec l'animal tel qu'il est
aujourd'hui n'est certainement pas le même que celui qu'il avait
quelques siècles plus tôt, encore moins celui qu'il avait au début
de son humanité. L'homme s'est fait homme en même temps
qu'il a fait l'animal, deux concepts qui n'existeraient pas l'un sans
l'autre. L'homme est ce qu'il est, un être pensant qui n'est
justement pas une roche, une plante ou un animal. Et pourtant, dans
une société qui semblerait vouloir faire de l'homme une catégorie
à part entière, les personnifications, allégories, analogies et
autres métaphores confèrent aux animaux autant d'humanité qu'elles
attribuent une animalité aux hommes. L'image de l'animal à travers
l'humain et l'humain à travers l'animal est précisément ce sur
quoi nous pouvons remarquer qu'au fil des âges c'est une
complémentarité que nous proposons d'approfondir.
Cette
réflexion s'inscrit dans une démarche militante antispéciste,
visant la reconsidération du règne animal dans son ensemble en tant
que totalité cohérente. Beaucoup d'argumentations reposent sur des
comparaisons biologiques, psychologiques... Le travail qui suit ne
cherche pas à compter les différences qui séparent l'homme et les
autres animaux mais vise à trouver dans quels rapports cet écart
s'est-il constitué, de quelles confrontations sont-elles nées.
Puisqu'il se veut original, le texte dépassera le simple rapport à
la nourriture, à la chasse ou la domestication et ira puiser des
questions dans un rapport plus général, du divin au commun, du
sacré au comique...
Manger
des animaux n'est pas une évidence absolue. Cette pratique repose
sur l'affirmation d'une supériorité, voire d'une possession de la
nature et des animaux, idée que nous remettons en doute ici.
Déconnectés du contact réel, physique, direct avec les animaux,
les consommateurs de produits carnés ont conscience ou n'ont pas
conscience de ce lien établi avec le vivant car il est noyé par la
manipulation commerciale. Ces quelques pages posent une simple
question : quelle image avons-nous de l'animal ? Si nous
justifions nos pratiques par nos idées, notre comportement n'est
jamais aussi simple que ça. Nos pratiques inscrites dans le temps
finissent par justifier nos conceptions. Il faut alors distinguer les
idées des actions.
La
démonstration que nous voulons suivre est simple sans être trop
simpliste. L'animal a depuis toujours été considéré de manière
absurde car paradoxale et hypocrite et l'éventail qui suit n'est pas
à comprendre comme une progression historiquement logique. Cependant
nous devons avouer que nous arrivons à l'apogée de ce qui
représenté l'absurdité avec un rapport complexe entre l'homme et
l'animal, ce dernier comme objet à la fois de fascination et
d'ignorance ou de mépris total. Là où la raison ne suffit pas il
faut montrer justement qu'elle n'agit pas. La conscience de la
condition animale n'est pas seulement le fruit d'un raisonnement mais
l'écoute d'une sensibilité et le questionnement de comportements
conditionnés par les images que l'on nous donne.
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