Si les expressions d'une
langue sont traduisibles d'un pays à l'autre, certaines subtilités
culturelles sont définitivement propres. Je ne parle pas de détails
grammaticaux techniques spécifiques à telle ou telle langue. Quels
sont les premiers mots que l'on apprend quand on souhaite s'initier à
une langue étrangère ? «
Bonjour ! »
, «
Merci ! » ou «
Comment allez-vous ? ».
Ces mots si simples et si courants ne sont pourtant pas innocents et
révèlent déjà, lorsqu'on s'y intéresse, les différences qui
peuvent exister entre deux cultures. Alors qu'en suédois l'on se salue avec un Hey
! Hey !
franc et naturel, une telle attitude chez nous passerait pour celle
d'un farfelu ou encore d'un jeune
en manque d'éducation.
Puisque le langage est social et manifeste le rapport de soi à
autrui, ce qui est significatif se trouve dans la manière que nous
pouvons avoir pour désigner l'interlocuteur, c'est sur ce point
précis que je voudrais que nous nous intéressions. Il y a ce que
nous appelons le respect
et la politesse.
Le respect se porte sur soi, les autres, les règles, les
institutions, les conventions, les idées. Ainsi nous pouvons dire
que nous respectons des engagements comme nous respectons la loi et
de même lorsque nous respectons les traditions c'est que nous sommes
agissons conformément à ce qu'une majorité a auparavant décidé
comme la bonne manière d'agir. Le respect d'une personne est
légèrement différent et
les nuances d'un pays à l'autre se manifestent à travers le
langage.
En
anglais il n'y a qu'un seul mot pour s'adresser à quelqu'un, c'est
you
(au singulier comme au pluriel) que les français traduisent par tu
ou
par vous.
Comment faire pour savoir quel terme utiliser ? Par la situation
et le rapport qu'entretiennent les deux interlocuteurs. C'est
pourtant une grande nuance de la langue anglaise qui perd de sa force
quand elle est traduite. Le vouvoiement est un phénomène plutôt
intéressant. Il marque une certaine distance en conférant à
l'interlocuteur une qualité supérieure : vous
est
une personne du pluriel, marque le nombre. On vouvoie en général
quelqu'un de plus âgé que soi, de plus gradé, de plus noble. Le
vouvoiement peut-être une marque sociale là où certains enfants
vouvoient leurs parents, d'autres les tutoient. Cette marque de
respect n'est pas toujours bilatérale. Deux personnes âgées se
vouvoient lorsqu'elles ne se connaissent pas, se tutoient avec plus
d'intimité. Parfois certains tutoient et exigent d'être vouvoyées.
En allemand comme en espagnol et d'autres langues la marque de
respect se traduit par la troisième personne. Sie
en allemand et Usted
en espagnol montrent un éloignement qui se retrouve dans les
vieilles expressions françaises comme « Monsieur
voudra bien se donner la peine de... »
où l'interlocuteur est carrément désigné indirectement et on
imagine qu'un serviteur de la même manière n'oserait lever ses yeux
à la hauteur du regard de sa majesté ! Le respect se traduit
dans le langage, il est l'image de la relation sociale. Celui-ci
prend beaucoup plus d'importances dans certaines langues comme le
vietnamien qui a hérité du patrimoine confucéen dont semble s'être
débarrassé le mandarin.
Saluer
quelqu'un c'est lui souhaiter d'avoir une bonne journée, un bon
jour.
Ce que l'on retrouve dans beaucoup de langues : Guten
Tag , Buenos dias , Buon giorno... Alors
que dans d'autres langues c'est directement le bonheur ou la paix que
l'on souhaite à la personne à laquelle on s'adresse : Shalom
en hébreux signifie paix, et la locution chinoise 你好
qui
se traduit par bonjour
signifie littéralement « bonheur à toi ». En vietnamien
le verbe saluer chào
ne peut s'employer seul, il doit être accompagné d'un complément
qui désigne la personne que l'on désire saluer et qui diffère
selon le sexe, l'âge, le statut des deux interlocuteurs.
Chào cô, chào bà, chào ông, chào anh, chào chi, chào em
sont donc différentes manières de saluer suivant si la personne
s'adresse à une jeune femme, une dame plus âgée, un homme plus
âgé, un jeune homme, une jeune femme du même âge... Le respect
est tellement présent dans la langue vietnamienne que même si il
existe un mot pour la première personne « tôi »,
celui-ci n'est utilisé qu'en privé entre personnes de même âge,
chez les jeunes. Le reste du temps chacun est donc désigné à la
troisième personne en utilisant les mêmes « pronoms »
qui marquent le respect.
La
politesse est une convention de langage et de comportement. Pourtant
certaines communautés comme celle des compagnons pensent, à juste
titre, que la politesse qui est signe de respect passe par l'égalité
avant-tout et que cette dernière peut très bien s'accommoder du
tutoiement. Parfois le vouvoiement qui facilite la distanciation
n'est effectivement pas la marque du respect mais cache aussi le
mépris.
NEWSRING : La politesse est-elle ringarde ?
NEWSRING : La politesse est-elle ringarde ?
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